Hausse des prix de l’énergie : quel impact sur les énergies renouvelables en France ?

mercredi 14 décembre 2022

Interview réalisée le 22 novembre 2022 : avec Lancelot d’Hauthuille, co-fondateur du fournisseur d’énergie renouvelable Plüm Energie, nous abordons 3 questions d’actualité, en lien avec lan hausse des prix de l’énergie.

 

Je donne du sens : Bonjour Lancelot, peux-tu nous dire quelques mots au sujet de Plüm Energie ?
Lancelot d’Hauthuille : 
Bonjour, je suis Lancelot, un des fondateurs de Plüm Energie, un fournisseur qui vend de l’électricité verte, locale et d’intérêt général.

Très important pour nous l’intérêt général, ce qu’on fait depuis notre lancement, c’est qu’on récompense nos clients qui réduisent leur consommation d’énergie. On a beau vendre une électricité de super qualité, qui vient en direct de producteurs, on fait tout pour que nos clients la consomment le moins possible, et c’est à titre là qu’on est à la recherche de l’intérêt général.

Depuis le début de l’année, on a rejoint un groupe international qui est le groupe Octopus Energie. Vous pouvez voir derrière moi ces charmantes petites pieuvres qui sont les les symboles du groupe Octopus Energie. Rejoindre ce groupe va nous permettre de voir un cran au-dessus, de pouvoir investir dans d’autres champs que strictement la fourniture d’électricité renouvelable et de continuer à servir notre notre mission qui est la mission du groupe Octopus, et de Plüm depuis le démarrage, qui est d’accélérer la transition énergétique. C’est inévitable, ça doit arriver, mais nous on veut que ça arrive plus vite !

Je donne du sens : Pourquoi les prix des énergies renouvelables ont-ils aussi augmenté ?
Lancelot d’Hauthuille : 
Très bonne question, la réponse n’est pas simple, ce n’est pas très intuitif : pourquoi l’envolée des prix du gaz et les problèmes du nucléaire influencent l’énergie produite par du vent ou du soleil ? Pour ça, il faut comprendre la manière dont fonctionnent aujourd’hui les producteurs d’énergies renouvelables, ceux qui fabriquent la transition énergétique. Quand ils préparent un projet, la plupart de ces projets, je dirais l’écrasante majorité aujourd’hui, sont co-financés par l’État.

Il y a des subventions publiques qui assurent au producteur un prix connu à l’avance pour son énergie, ça lui permet de faire aboutir son projet, de le financer, et ce prix est connu à l’avance. Historiquement, il était plus élevé que les prix du marché, donc c’était une subvention. Aujourd’hui, c’est très inférieur au prix du marché, et du coup l’État jusqu’à présent « perdait de l’argent » en subventionnant le renouvelable, maintenant, il empoche la différence.

Le producteur, lui, paye toujours le même coût, et au quotidien, il continue à vendre l’électricité sur les marchés.
Et donc, même si l’énergie est produite grâce à du vent ou à du soleil, elle est au final vendue sur les marchés, et le prix des marchés dépend essentiellement des prix du gaz et de la santé du parc nucléaire. C’est pour ça qu’il y a un lien qui se crée, un peu malgré nous, fournisseurs, entre les marchés où le prix de l’énergie est ultra fluctuant, et le prix de l’énergie renouvelable.

Et donc, l’autre question qui peut se poser, c’est où va cet argent ?
Est-ce que certains producteurs en profitent indument ?
Ce n’est pas le cas aujourd’hui, car c’est l’État qui récupère cet argent, donc on pourrait dire que l’État gagne beaucoup d’argent, mais il se trouve que par ailleurs l’État subventionne très largement, avec le bouclier tarifaire, les factures d’électricité et de gaz des Français, et du coup cet argent va dans les poches de l’Etat, mais après au final dans les poches des consommateurs… on ne peut pas dire qu’ils y gagnent, mais c’est ça qui a permis en France de ralentir un peu l’inflation.

D’autres pays qui n’ont pas se ce type de bouclier tarifaire voient leur inflation galoper, et ça crée des énormes problèmes.
Donc en résumé, aujourd’hui si les prix s’envolent, c’est l’État qui en bénéficie, ce qui lui permet de financer en partie le bouclier énergétique qui protège les Français de l’inflation.

Je donne du sens : Pourquoi les fournisseurs comme Plüm Energie n’acceptent plus de nouveaux clients ?
Lancelot d’Hauthuille : 
Alors en effet, on n’accepte plus de clients depuis depuis le mois de septembre, et j’avoue que, en tant que fournisseur, c’est très très frustrant d’avoir quelqu’un qui veut nous confier la gestion de son électricité et de devoir dire non.

L’explication est assez simple : on a une une politique très raisonnable de gestion de nos approvisionnements d’électricité. Ca reste quelque chose de complexe, mais en résumé, on essaye de toujours d’acheter à l’avance, en tout cas de prévoir la consommation d’électricité de nos clients, pour ne pas être soumis aux aléas du marché, dont on entend parler beaucoup aujourd’hui.

Donc, on avait très largement prévu, pour cet été et cet hiver, l’électricité de nos clients, et aussi une certaine croissance, c’est-à-dire qu’on avait pensé faire grandir un petit peu notre base clientèle, à un rythme qu’on connaît bien, et ça c’était bien calé, c’était acheté à l’avance, et tout était fait pour garantir à nos clients un prix juste d’électricité.

Chez Plüm Energie, on suit les tarifs réglementés depuis presque toujours, et on n’avait pas prévu de le changer, on n’avait aucune envie d’augmenter le prix de nos clients.

Donc, c’est en achetant à l’avance qu’on pouvait qu’on pouvait faire ça.

Il s’est trouvé que certains de nos concurrents ont augmenté très très fortement l’électricité pendant l’été, probablement parce que justement ils avaient pas cette politique d’anticipation, et du coup beaucoup de leurs clients ont toqué à notre porte, et on a eu des ventes presque les plus fortes de l’histoire de l’entreprise cet été, en tout cas qui ont très largement dépassé ce qu’on avait anticipé comme croissance.

Et on s’est retrouvé dans une situation où, si on avait continué à prendre ces clients, on aurait dû soit augmenter fortement leurs prix, soit augmenter le prix de nos clients, et dans tous les cas deux choses qu’on ne voulait pas faire.

Et donc, la seule façon de protéger l’engagement qu’on a pris avec nos clients, c’était de fermer temporairement heureusement nos portes pendant l’hiver, en tout cas tant que les prix de marché étaient à des niveaux complètement complètement fous.

Juste pour donner un ordre de grandeur, en tant énergéticien nous on achète des mégawatts-heure, donc des milliers de kilowatts-heure, et 1 mégawattheure, dans un temps normal, ça peut valoir 50-60 euros et au détail quand on a empilé toutes les taxes et les frais de fonctionnement du réseau, il est vendu aux consommateurs entre 150, 160, 170 euros TTC, en tout cas certainement moins de 200.

Pendant l’été, il valait 1200 euros le mégawattheure donc il n’y a pas besoin d’être très très fort en économie pour savoir que quand on achète quelque chose 1200 euros et qu’on le vend 150 euros, c’est difficile de gagner de l’argent.

Donc, on n’est pas en train de vouloir faire des marges astronomiques mais au moins une marge suffisante pour payer nos salaires et les salaires des employés etc.

Donc, ce n’était pas raisonnable pour nous de garder nos portes ouvertes pendant toute cette période, notamment parce que on a eu un énorme afflux des clients venant de certains concurrents pas très scrupuleux de mon point de vue.

Je donne du sens : Quelles solutions avez-vous pour limiter ces instabilités ?
Lancelot d’Hauthuille : 
Ce qu’on cherche à faire, c’est aujourd’hui très minoritaire et on cherche à le développer, c’est notre rôle de fournisseur, c’est de développer des nouveaux projets d’énergie renouvelable, et nous en tant que fournisseur d’acheter sur le très long terme, sur 15 à 20 ans à l’avance, l’énergie de ces champs d’éoliennes ou de ces fermes solaires.

Et ainsi, comme ça, on n’est plus dépendant des marchés, c’est-à-dire que nous on a un rapport direct, sans intervention des marchés, avec les producteurs, on achète à un prix juste pour les producteurs, et après on peut revendre à un prix juste pour le consommateur, qui ne dépend plus des marchés.

Donc ça, c’est vraiment ce qu’on cherche à faire, sauf que on parle d’échelle sur plusieurs années, voire presque dizaines d’années, le temps que tout ça se mette en place.

Aujourd’hui, l’immense majorité des producteurs d’énergies renouvelables vendent leur énergie sur les marchés, même si derrière, l’État les subventionne, et c’est pour ça que le prix du gaz, quand il monte, fait monter au global les prix de l’électricité.

Merci beaucoup, Lancelot !

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